Interview : Call of Cthulhu, plongeon dans l’horreur de Lovecraft !

Vous avez peur du noir ou des araignées… Alors vous n’avez rien vu, et c’est peut-être mieux comme ça ! Car certaines choses restent innommables et vous en approcher risquerait de vous faire tomber dans la folie…

Malgré ces avertissements, vous êtes nombreux à jouer avec votre santé mentale. Amoureux de l’oeuvre de Lovecraft, de grands anciens ou de toutes créatures tentaculaires, jeunes curieux arrivés par hasard à lire ces quelques lignes, cet article est pour vous ! Cyanide Studio (Styx, Blood Bowl, Game of Thrones, etc…) vous réserve une adaptation du jeu de plateau Call of Cthulhu. Un incontournable qui vous plongera peu à peu dans l’horreur lovecraftienne.

Pour en savoir plus sur le développement et l’adaptation du jeu vidéo, découvrez notre interview. Attention, une irréversible envie d’y jouer vous pend au nez… Sortie prévue sur PC et consoles cette année.

Aurélie Knosp : Bonjour, dis-nous qui es-tu et que fais-tu sur le projet Call Of Cthulhu ?

Maximilien Lutz : Je suis Maximilien LUTZ et je suis Lead Narrative Designer sur Call of Cthulhu.

AK : Combien êtes-vous au développement ? Depuis combien de temps ?

ML : Nous sommes plus d’une trentaine sur le projet. Il a débuté il y a un peu plus de deux ans (2015).

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AK : Quel est votre leitmotiv sur l’ensemble de vos projets pour créer une identité aux jeux de Cyanide ?

ML : En ce qui concerne les RPG narratifs (Game of Thrones, Of Orcs & Men ou encore Call of Cthulhu), notre but est toujours de faire en sorte que le joueur soit porté par une histoire intéressante dont il est le principal acteur et dont les choix engendrent des différences d’expérience entre les joueurs.

AK : Quels sont les principaux métiers mis en œuvre sur ce projet ? Concrètement, en quoi consistent-ils ?

ML : Les principaux métiers sont les mêmes que sur la plupart des autres productions de jeux vidéo. On retrouve les Game Designer qui vont écrire l’ensemble des règles du jeu (ce que va pouvoir faire le joueur en gros), ensuite les Level Designers et les Quest Designers qui vont transposer ces règles et les appliquer au déroulé du jeu découpé en missions / quêtes. On a également les Graphistes qui vont créer tous les éléments visuels du jeu (décors, personnages, etc…), les Sound Designers pour le son, les FX Artists qui vont créer tous les effets spéciaux (feu, eau, explosion, etc…), les Animateurs pour les animations des personnages / du bestiaire, les programmeurs qui vont créer les outils pour le développement et surtout faire en sorte que le jeu prenne vie. Enfin pour la partie narration on a évidemment les Writers qui vont écrire l’histoire, les personnages et les dialogues et enfin les Narrative Designers qui vont faire la jonction entre le gameplay et l’histoire et ainsi s’assurer auprès des différents métiers que l’on raconte tous la même chose.

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AK : Avec quels logiciels travaillez-vous, sont-ils « maison » ?

ML : On a des outils maison pour l’écriture des dialogues à embranchements notamment. Sinon pour tout ce qui est programmation on utilise les outils type Visual Studio et Unreal Engine 4 pour le moteur graphique du jeu. Au niveau des graphistes on a Zbrush, Blender et d’autres. 3DSMax pour les animateurs et un papier + crayon pour les game designers.

AK : Par quelles étapes passe-t’on du livre au jeu de plateau puis du jeu de plateau au jeu vidéo ?

ML : Pour l’histoire nous avons eu la chance de travailler avec l’auteur Mark Morrison qui est un auteur très connu des joueurs du jeu de rôle car il a signé l’une des campagnes les plus récompensées (Terreur sur l’Orient-Express). Au niveau de la structure même du récit on s’est calqué sur la même structure que l’auteur H.P. Lovecraft, à savoir qu’on part d’une enquête ordinaire pour plonger peu à peu dans l’horreur lovecraftienne.
Concernant les règles du jeu de rôle, on en a repris les principales mécaniques que l’on a transposées vers le jeu vidéo qui possède ses propres contraintes. On ne peut pas utiliser les règles telles quelles, il faut s’adapter au média. Une fois ces deux éléments combinés, on obtient la sauce de notre jeu qui est à la fois dans la lignée des nouvelles de Lovecraft concernant la narration et qui utilise des éléments marquants du jeu de rôle.

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AK : Décrivez Call Of Cthulhu en trois mots clefs ?

ML : Folie, horreur, innommable

AK : Qu’avez-vous conservé et qu’avez-vous retiré de l’univers et des mécaniques du jeu de rôle ?

ML : Nous avons principalement repris les compétences les plus emblématiques du jeu de rôle papier ainsi que le système de gestion de la santé mentale. Concernant l’univers nous utilisons certaines créatures ainsi que quelques références à des personnages connus de la licence.

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AK : Sur quelle mécanisme sera centré le jeu (enquête/infiltration, horreur/survie/folie, jeu de rôle…) ? Comment ?

ML : RPG Investigation, le joueur devra prêter attention à ce qui l’entoure, collecter toutes les informations possibles car elles seront ses meilleures armes pour progresser dans l’aventure. Et surtout bien peser le pour et le contre avant de prendre des décisions qui pourront avoir des conséquences tragiques.

AK : Quels sont les éléments qui feront diminuer votre santé mentale ? Est-ce possible de récupérer de la santé mentale, comment ?

ML : Tout comme dans les nouvelles ou le jeu de rôle, les rencontres avec les entités nous feront perdre de la santé mentale ainsi que certains choix qui nous seront proposés et qui permettront d’accéder à la vérité. Vérité qui aura donc un prix: une partie de notre santé mentale. On pourra prévenir une partie des pertes mais pas en regagner.

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AK : Existe-t’il vraiment une réalité ? Comment faîtes-vous ressentir cette ambivalence ?

ML : La réalité selon Lovecraft sera révélée lors des pertes de santé mentale, notamment via des nouvelles options de dialogue si notre santé mentale est trop basse.

AK : Pouvez-vous nous parler d’Edward Pierce et de l’île Darkwater et du Grand Ancien (background, sources d’inspiration, objectif, faits marquants…) ?

ML : Edward Pierce est un vétéran de la première guerre mondiale, c’est un détective privé qui est contacté par un homme dont la fille et le petit fils sont morts dans un incendie sur l’île de Darkwater. L’homme ne croit pas à la thèse de l’accident retenue par la police locale et souhaite en savoir plus. Pierce décide donc de se rendre sur l’île de Darkwater afin de mener sa propre enquête mais il est loin d’imaginer ce qui se cache derrière cette affaire. Il n’est pas le bienvenu sur l’île et l’ombre d’un culte vénérant un dieu ancien s’étend sur Darkwater.

AK : Y a-t’il une symbolique derrière les baleines mutilées ? Quels symboles forts reprenez-vous de l’univers de Lovecraft ?

ML : Oui, mais je ne peux pas en dire plus sans dévoiler l’intrigue du jeu. Pour les symboles, il y aura un culte, un Grand Ancien et d’autres références à l’univers de Lovecraft.

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AK : Sans le pouvoir des mots et de la suggestion, comment comptez-vous montrer ce qui ne peut pas l’être voir qui ne peut être prononcé ?

ML : Le système de gestion de la santé mentale est là pour ça, si le joueur s’attarde trop sur une créature par exemple, cela lui déclenche une crise de folie, ses sens se troublent, il a des hallucinations, etc…

AK : Sur cette création, de quoi êtes vous le plus fier ?

ML : C’est un univers complexe et un concept compliqué à adapter mais nous avons fait en sorte d’être les plus fidèles possibles à la vision que Lovecraft avait de la folie et nous pensons que les fans de l’auteur apprécieront cette démarche.

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AK : Avez-vous un regret ?

ML : On aimerait toujours pouvoir faire mieux, pouvoir faire plus, mais on doit se tenir à nos contraintes et nous avons cherché à faire au mieux avec le temps qui nous était imparti donc non pas de regret.

AK : Le jeu vidéo est-il un art à part entière et une nouvelle façon de retranscrire l’univers de Lovecraft ?

ML : Oui, on peut considérer le jeu vidéo comme un art à part entière, il y a beaucoup d’artistes formidables qui travaillent dans le jeu vidéo et ce dans diverses disciplines : la musique, les graphismes ou même l’écriture. C’est un véritable défi que d’adapter du Lovecraft sur un autre média que le livre. Que ça soit en film ou en jeu vidéo, il y a du challenge mais il y a tous les outils pour le faire, à nous de trouver les bons qui permettront de ne pas trahir la vision de l’auteur.

AK : Merci. Et n’oubliez pas, lecteurs : “ Ph’nglui mglw’nafh Cthulhu R’lyeh wgah-nagl fhtagn.”

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